dimanche 13 janvier 2013

POLARS ET SF - Troisième partie

La troisième partie tant attendue... (enfin j'espère...) 


Celle-ci conclut le dossier polars et SF qui devrait je pense, donner de l'inspiration à tous les rôlistes qui en recherchent. A défaut, cela devrait aussi motiver les sceptiques à lire de la Science-Fiction dont les bases sont accessibles (le polar), et peut être faire découvrir quelque chose, même au plus sceptique vis à vis du genre...



LES POLARS-SF
Le polar tourne autour de thèmes qui sont propres à la Science-Fiction, et qui sont le plus souvent la clé de l’enquête policière. La démarche du personnage principal est propre au polar, d’ailleurs il est souvent policier, détective privé ou journaliste. Mais les questions qui se posent à lui n’auraient pu apparaître en dehors d’un univers d’anticipation scientifique. Le polar-sf est né, greffe totalement réussie d’un des deux genres sur l’autre... [mais lequel ?]

 





Etoile polaire de la fusion polar-sf, "Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? " de Philip K. DICK, rendu célèbre par le fabuleux film "Blade Runner" de Ridley SCOTT. Un Blade Runner, c’est un tueur chargé d’exterminer les androïdes rebelles qui s’infiltrent sur Terre. Et Rick est le meilleur Blade Runner de la côte Ouest. Ce qui ne l’empêche pas d’être un tendre : il rêve de remplacer un jour son simulacre [électrique] de mouton par un vrai ! Hors de prix sur une planète où s’éteint la vie animale ! Aussi quand on lui propose une somme fabuleuse pour éliminer de dangereux Nexus 6 signalés en Californie, il fonce... Mais, face à lui, surgit la très belle Rachel. Femme ou androïde ? L’aime-t-il ? Peut-il l’aimer ? L’humanité est elle envisageable pour un androïde ? DICK dépeint toujours des sociétés fascinantes, palpables. Il dénonce des problèmes et des interrogations qui sont propres à notre société de consommation, parfois avec beaucoup d’avance sur son temps.
Dans "Minority report", autre polar-sf, récemment adapté au cinéma par Steven SPIELBERG, Philip K. DICK dépeint une société dotée d’une police capable d’anticiper le crimes en arrêtant leurs auteurs avant qu’ils ne commettent, grâce à des personnes douées de précognition.[lire aussi "Substance Mort", qui voit l’infiltration d’un réseau de dealers par un flic forcé de consommer lui aussi des drogues plus qu’hallucinogènes.]


Kevin W. JETER, en fidèle disciple de DICK, fusionne lui aussi roman noir et anticipation, et reprend à son compte la thématique de la frontière ténue séparant réalité et virtualité. Dans ses romans, il incorpore à ce canevas ses propres réflexions, sa fascination pour les univers rétro-futuristes et une vision résolument sombre des lendemains qui nous attendent, pour en faire une oeuvre complexe, dérangeante et novatrice. "Noir" est représentatif de son oeuvre : dans un futur proche, Los Angeles est devenue une métropole rutilante et attractive, enclave privilégiée au sein d’un monde qui s’enfonce petit à petit dans un inéluctable marasme économique et social. Mais derrière cette façade dorée se dissimule un univers labyrinthique souterrain, où les nantis se pressent en quête de plaisirs interdits. McNihil, ex-flic désabusé reconverti en privé, s’est fait chirurgicalement altérer la vision pour appréhender son environnement en noir et blanc, comme dans un vieux film d’Humphrey Bogart. Il s’est spécialisé dans les enquêtes sur les contrefaçons et travaille pour l’une des rares mais puissantes corporations qui semblent tout contrôler dans ce monde sombre et interlope. Appelé à élucider le meurtre d’un jeune cadre, il va rapidement se lancer sur la piste d’un simulateur on line ouvrant sur un maëlstrom d’expériences érotiques parmi les plus taboues...


L’arrivée du genre cyberpunk, offre de nouvelles possibilités. Par exemple Richard MORGAN qui, pour son premier roman [un cyber-polar], s’inspire de la tendance cyberpunk s’exprimant au travers des mangas japonais [tels que « cybercity » ou « ghost in the shell »] et des romans de William GIBSON, ou Walter J. WILLIAMS [cf. le DOSSIER CYBERPUNK]. Dans "Carbone modifié", il s’approprie le principe du meurtre-énigmatique. Car dans ce monde, la mort n’est plus un problème : la conscience est stockée dans une pile corticale implanté en chacun dès sa naissance, et s’il nous arrive un pépin... il suffit de trouver un nouveau corps, et ça repart ! Seule limite : il faut en avoir les moyens... Dans ce paysage, Takeshi Kovacs, un mercenaire interstellaire, se retrouve sur Terre, chargé d’enquêter sur le suicide d’un milliardaire. Mais pourquoi se suicider quand on sait qu’on revivra le lendemain ? Un roman haletant, rudement efficace, superbement maîtrisé.


Pour la France, citons DOA, qui avec les "Fous d’avril" nous raconte l’histoire de Markus Freys, un flic recruté par Europol, dont les origines russes un peu troubles s’ajoutent à des talents particuliers. Des évènements étranges frappent la communauté des « passeurs » [des techniciens du Net]. Joshua, le jeune frère de Markus, est lui aussi un passeur, un petit génie de la réalité virtuelle, et va mettre en garde Markus sur d’étranges affaires de cyber-criminalité. L’enquête ne fait que commencer et Markus voit peu à peu ceux qui l’entourent mis en grand danger. Y a-t-il un tueur sur le Réseau ?
Qui est-il ? Comment l’arrêter et échapper à la conspiration politique de plus en plus puissante qui a pris le contrôle de cette enquête terrifiante ? Et pourquoi ce mystérieux criminel semble-t-il si bien connaître Markus et son frère ? DOA explore le domaine des projets de recherche doté d’une éthique douteuse, a l’heure où l’on s’interroge sur les Intelligences artificielles et le clonage. Reprenant un peu le thème d’Akira d’Otomo, les « fous d’avril » est un premier roman intéressant malgré son style et sa narration parfois un peu lourds [un auteur à suivre].


La physique quantique possède aussi son polar SF et ceci grâce à Greg EGAN, qui avec "Isolation" nous imagine un monde rempli de nanotechnologie à en crever, où les moustiques génétiquement modifiés font de l’espionnage industriel, et où la théorie des quantas permet de choisir l’avenir entre tous les avenirs possibles, y compris les moins probables... L’intrigue est la plus mathématique que l’on ait lu depuis longtemps, la réflexion prend une forme d’algorithme névrosé autour de la réalité, très proche d’ailleurs en cela de l’univers de Philip K. DICK. Le roman est assez difficile à appréhender et l’on peut se perdre assez facilement dans sa lecture.

 
Autre auteur produisant un mélange hétéroclite, Michaël Marshall SMITH est apparu sur la scène SF d’une façon aussi rapide qu’inattendue. Ses livres ne suivent pourtant pas un schéma classique et plonge des intrigues policières dans des univers à la sauce cyberpunk, le tout agrémenté de scènes de pure terreur !
Le constat est sans appel : ses livres sont appréciés par la critique, le public et même par le monde du cinéma. « Frères de chair », son deuxième roman, illustre bien la contribution de la SF, de l’horreur, du fantastique et du polar à son histoire. Il raconte l’histoire de Jack RANDALL, qui a fuit avec six « alters », des clônes destinés à servir de pièces de rechange humaine et se retrouve avec à ses trousses toute la mafia de New-Richmond, cité volante clouée au sol et encerclée de taudis.Le moins que l’on puisse dire c’est que les deux genres se marient merveilleusement. Les éléments spéculatifs de la science-fiction apportent des perspectives intéressantes au polar qui reste au final de structure fort classique.


CONCLUSION :

En se penchant ainsi sur le mixage des genres, on en vient à chercher à les redéfinir pour mieux les discerner. Qu’est-ce qui fait un polar ? La présence d’un flic ? Le principe d’une enquête, ou d’un meurtre ? Et qu’est-ce qui fait la SF ? [la question à cent balles !!!] Et du coup, comment faire quand l’auteur prend un malin plaisir à faire en sorte qu’une I.A. n’y retrouve pas ses petits nanobots ? Finallement, à travers cette liste d’exemples de tous les dosages possibles entre SF et Polar, nous espérons simplement vous avoir donné envie de lire, sans a priori, de nouveaux auteurs qui ont l’audace de dépasser les étiquettes pour laisser courir leur [notre] imagination.

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